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Portrait d’un confrère étranger : Liene Molly

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Vous êtes diplômée d’une université Belge. Qu’est-ce qui vous a motivé à partir aux Etats-Unis pour compléter votre formation ?

J ’ai été diplômée de l’Université catholique de Leuven en Belgique en 2001. A la suite de mon diplôme, j’ai décidé de suivre un programme qui combinait un enseignement de parodontologie et une prépa pour un PhD en sciences médicales, au sein de la même université. C’était un programme très intensif.

En janvier 2006, j’ai soutenu ma thèse intitulée « Les alternatives au protocole standard de l’ostéointégration des implants oraux ». Pendant mes années de recherche, je me suis particulièrement intéressée à la régénération osseuse ainsi qu’aux techniques de greffes osseuses, utilisant différents matériels. La thèse a surtout étudié les mises en charge précoces et immédiates des implants. Mais j’ai également décrit des protocoles de greffes osseuses et leurs résultats. L’utilisation d’une surface occlusive lisse en titane est une technique qui a été décrite pour la première fois par le Professeur Schmidt et ses collaborateurs en 1994, s’appuyant sur un test animal au cours duquel ils avaient placé une plaque en titane au sommet de l’os cranien de lapins. Nous avons modifié la membrane et avons d’abord procédé à une expérience sur animaux, qui s’est avérée suffisamment concluante pour que nous passions aux tests humains. Cette technique doit être encore améliorée mais elle promet un avenir radieux, car elle permet, sans utiliser de technique de greffe, la formation osseuse de plus d’un centimètre. Quand l’on compare cela aux greffes prises au niveau de la hanche, le taux d’échec précoce de l’implant (de sa mise en place jusqu’à la connexion du pilier) est un tout petit peu plus important pour la technique utilisant cette membrane, mais la transformation osseuse après le placement de l’implant est similaire, voire meilleure comparée aux implants placés dans des sites non modifiés ; ce qui est probablement dû à la présence d’os nouvellement formés.

C’est un avantage énorme par rapport aux greffes d’appositions depuis que nous savons que dans ces cas, la croissance osseuse perd en cicatrisant, plus de la moitié de sa masse initiale. L’intérêt que je porte à d’autres techniques d’augmentation osseuses, comme les greffes allogènes et les matériaux de greffe alloplastiques, tout particulièrement dans le même temps ou avant la pose d’implants, grandit de jour en jour. C’est pourquoi je désirais accroître mes connaissances en la matière. Après ma soutenance, j’ai pu aller à l’Université du Maryland à Baltimore (USA) où ils sont très au fait dans ce domaine de la Recherche. Les greffes osseuses alloplastiques déminéralisées et congelées, en combinaison avec les facteurs de croissance, sont les principaux sujets de recherche ; et bien sûr, je peux leur enseigner la chirurgie assistée par les techniques de guides chirurgicaux, avec ou sans mise en place immédiate.

Quelle est votre expérience de ces premiers mois passés à Baltimore ?

Les Etats-Unis sont complètement différents de l’Europe. Pas seulement d’un point de vue culturel : ils ont Disney World, Hollywood et de l’excellente viande de bœuf, nous avons Paris, Rome et Bruxelles ; mais aussi dans la manière de traiter leurs patients ainsi que du point de vue des opportunités qu’offrent les universités. Aux Etats-Unis, les universités ont bien plus d’argent attribué à la Recherche et les patients consacrent beaucoup plus d’argent aux soins dentaires, même dans des régions telles que Baltimore. Pour vous donner un exemple, au département de parodontologie de l’Université du Maryland, ils utilisent des membranes, du PRP et de l’endogain tous les jours et peuvent prendre la décision de s’en servir en peropératoire, alors qu’à Leuven, nous discutons d’abord du montant de chaque chose, et lorsque le patient est finalement d’accord pour payer, alors on utilise le produit.

C’est probablement la raison pour laquelle en Europe, nous réalisons plus de lambeaux de repositionnement apical et de greffes prises au niveau de la hanche et qu’ici, aux Etats- Unis, il y a plus de protocoles de régénération osseuse avec des membranes et après chaque extraction, nous recherchons la préservation du site.

Vous avez choisi de vous orienter vers une dentisterie assistée par ordinateur. Comment vous est venu cette idée ?

Cette idée est venue bien avant que je démarre mes études dentaires. La chirurgie guidée ou la chirurgie « stéréostatique », telle qu’elle était nommée antérieurement, trouve ses racines dès 1908 à « The University College of London », où Victor Horsley et Robert H. Clarck développèrent les premiers appareils pour les expériences animales. Un peu plus tard, en 1947-1949, deux neurochirurgiens américains, Ernest A. Spiegel et Henry T. Wycis et un neurochirurgien suédois, Lars Leksell développèrent le premier dispositif stéréostatique pour la chirurgie du cerveau humain. En 1985, on a commencé à vouloir planifier l’implantologie à l’aide d’un ordinateur et on a essayé de trouver des méthodes afin de transférer cette planification dans le champ opératoire. En France, les systèmes de navigation optique ou magnétique ont été mis au points, ce qui s’est révélé extrêmement performant en endodontie ; simultanément, en Belgique, à Leuven, le département de parodontologie et de radiologie ont travaillé ensemble sur la modélisation en 3D et la planification en implantologie, permettant la fabrication stéréolithographique d’un guide pour utiliser les forets dans un axe optimal.

J’ai participé aux tests sur cadavre du système de chirurgie assistée, qui furent concluants pour passer aux tests cliniques. Avec mon mentor, le Professeur D. van Steenbergue, nous avons traité ensemble le premier groupe de patients en utilisant un guide chirurgicale établi à partir d’une copie stéréolithographique de notre planification 3D par ordinateur. Le groupe de recherche a apporté des modifications au système et nous avons ensuite été capable d’utiliser cette même technique pour la chirurgie sans lambeaux.

Pendant ces quatre à cinq années de recherche en chirurgie, nous avons modifié la technique. Aujourd’hui, cette technique est approuvée par la FDA et utilisable en pratique clinique.

Quel est le bénéfice en implantologie d’un système tel que Nobel Guide sur lequel vous faites beaucoup de conférences ?

D’après moi, le principal intérêt de ce système est la planification. Cela permet de prévoir vos implants en prenant en compte non seulement les contraintes anatomiques mais également le point de vue esthétique. Lorsque vous regardez le scanner reporté sur votre écran, le logiciel offre la possibilité de saisir l’os et de le regarder à partir du site de votre choix et permet de le rendre fiable, d’utiliser tous les os qui sont visualisés en image 3D pour votre planification implantaire. Cela permet également la chirurgie sans lambeaux et la fabrication d’une superstructure, temporaire ou finale, avant la chirurgie. Cela donne la possibilité d’améliorer la chirurgie juste avant la mise en place de la restauration, sans sutures et sans risque d’une inflammation sous les lambeaux. Pour les patients, c’est un réel bénéfice car il y a moins de gonflement, de meurtrissures et de douleur. Pour les dentistes, c’est plus de travail devant l’ordinateur afin de planifier de façon plus élaborée mais le temps passé au fauteuil est énormément réduit.

Vous êtes une des très jeunes conférencières internationales sur ce sujet et vous avez formé de nombreux confrères. Quel est votre avis sur l’avenir du numérique en dentisterie ?

Les techniques de chirurgie assistée par ordinateur sont le futur de la dentisterie ! Ma génération n’a pas de suite grandi avec les ordinateurs, je les ai connus vers l’âge de quinze ans. La nouvelle génération de dentistes qui commencent aujourd’hui leur formation seront bien plus à même de se familiariser avec cette technologie. Aujourd’hui, les étudiants emmènent leur ordinateur, leur clé USB et leur téléphone portable avec accès Internet en classe ! Dans la nouvelle école de dentisterie qui vient d’être ouverte ici au Maryland, vous disposez d’un accès WiFi n’importe où. De nouvelles classes interactives sont montées, dans lesquelles les étudiants disposent de l’Internet pendant le cours, ont accès à Google pour trouver des réponses, ce qui rend le cours vraiment interactif. Cela va aussi obliger les enseignants à modifier leurs techniques pédagogiques. Les salles de laboratoires sont appelées « salles de rêve » et sont entièrement configurées à partir de la technologie numérique. Ces étudiants réclameront la même technologie dans leur propre pratique. Je pense que dans dix ans, tous les cabinets dentaires disposeront de dispositifs CAD/CAM pour faire les inlays, les onlays et les couronnes. L’ordinateur sera utilisé pour rechercher les dossiers des patients et les logiciels 3D aideront les traitements en endodontie. Ce n’est pas parce que ce que nous faisons au quotidien fonctionne que quelque chose d’autre ne peut pas être mieux ni nous donner plus d’options.

Avez-vous l’intention de revenir en Europe ? Et dans ce cas, où souhaiteriez-vous pratiquer ou peut-être encore compléter votre formation ?

J’aimerai vraiment revenir en Europe dans un futur proche, principalement pour sa culture et son excellent pain, c’est pourquoi Paris serait une bonne option ! Les croissants au petit déjeuner ainsi que la baguette de pain tartinée de brie au déjeuner sont un délice.

Est-ce difficile d’être une femme conférencière sur le circuit international ?

Parfois, vous devez penser comme un homme et agir comme une femme, mais je ne trouve pas cela difficile. L’expérience internationale est une chance formidable pour moi, et j’aime voyager et rencontrer des gens intéressants. Actuellement, je voyage deux fois par mois, ce qui est pas mal du tout et je sais bien que pour beaucoup de femmes ce n’est pas possible. Elles ont besoin de prendre soin de leur famille. Cependant, c’est tout à fait possible de faire des conférences internationales pour une femme dentiste. Tout dépend de vos propres buts.

Avez-vous des contacts avec des consoeurs également conférencières et quels sont-ils, car il existe maintenant en France le premier congrès, à notre connaissance, d’Implantologie avec exclusivement des conférencières femmes ?

J’ai lié pas mal d’amitiés sur ma route, et parmi ces amitiés, des femmes comme Sonia Leziy (Canada), Danuta Broczic (Pologne), Annette Felderhoff (Allemagne) etc. C’est très bien d’avoir des conférences tenues par des femmes, car plus de 60% des étudiants en dentaire sont des femmes en Europe.

Dans l’histoire, c’est cependant un phénomène récent, c’est pourquoi nous devons encore patienter pour en sentir les effets dans l’organisation de conférences ou de groupes de travail. Mais je parie que d’ici quelques années les groupes de travail compteront une large proportion féminine. Le monde des conférenciers internationaux est actuellement encore un monde d’hommes, mais je peux vous dire que c’est déjà en train de changer.

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A propos de l'auteur

Dr. Bernard TOUATI

Docteur en Sciences odontologiques
Visiting Professor Hadassah Faculty of Dental Medecine Jerusalem
Ancien président de l’Académie européenne de dentisterie esthétique
Fondateur et ancien président de la SFDE

Rédacteur en Chef exceptionnel

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