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Intérêt de la chirurgie orthognathique du grand adolescent au grand adulte

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L’option de chirurgie orthognathique évoque de façon quasi systématique une crainte pour le patient. Lorsqu’ils sont consultés, l’entourage familial et les amis proches ne comprennent souvent pas l’intérêt de cette thérapeutique qui leur semble invasive et lourde. Dans bon nombre de cas, l’option orthodontique est comprise et même demandée, mais une réticence voire une opposition face à la chirurgie maxillo-faciale reste présente.

Le chirurgien-dentiste transmet aussi parfois ses propres inquiétudes à son patient.

L’objet de cet article, au travers de plusieurs exemples, est de montrer en plus de l’intérêt esthétique, l’intérêt sur le vieillissement de la dentition et sur le vieillissement du visage d’une thérapeutique orthodontique associée à une correction chirurgicale des décalages squelettiques. On se rendra également compte que l’indication de chirurgie des maxillaires n’est pas réservée qu’aux cas dits «extrêmes ».

Indications de chirurgie orthognathique dès l’adolescence

Proposer un traitement orthodontico-chirurgical à des adolescents peut sembler très délicat vis-à-vis des parents. Mais lorsqu’il existe un terrain héréditaire et que la croissance est défavorable ou qu’elle n’est plus stimulable dans le sens que l’on désire, il faut bien se rendre à l’évidence que l’indication d’un traitement orthodontique associé à une chirurgie de correction des maxillaires se pose afin de garantir la correction de la malocclusion.

1er cas :

Melle L. a 16 ans et vient consulter avec ses parents pour son manque d’occlusion et pour sa prognathie.

Elle présente une malocclusion de classe III associée à une promandibulie sur un type facial à tendance hyperdivergente (fig. 1).

Les pommettes sont effacées, la lèvre supérieure est fine, le sillon labio-mentonnier est peu marqué. Le visage donne une impression globale plutôt triste, typique des classe III (fig. 1a).

La croissance mandibulaire a pris le dessus sur la croissance du maxillaire et l’âge de la patiente ne permet

pas d’espérer inverser cette tendance à la prognathie par des thérapeutiques qui agissent sur la croissance ou par des déplacements alvéolaires purs.

Un traitement orthodontique associé à une chirurgie des maxillaires a donc été proposé aux parents qui ont très bien compris la situation et qui ont accepté la proposition après avoir rencontré le chirurgien.

pommettes-effacees

Figures 1a , 1b : pommettes effacées, lèvre supérieure fine, promandibulie + malocclusion de classe III. Figure 2 : plaques et vis d’ostéotomies bimaxillaires et génioplastie.

La patiente a suivi un protocole classique qui se déroule en 3 étapes :

  • Etape 1 : préparation orthodontique de décompensation.
  • Etape 2 : chirurgie orthognathique : abord intrabuccal, aucune cicatrice externe.
  • Etape 3 : finitions orthodontiques puis contention orthodontique.

La 1ère étape de préparation orthodontique par multibague bimaxillaire a duré 18 mois. La patiente a été opérée à 17ans ½ (Dr Bernard NEGRIER) : avancée et impaction du maxillaire, recul mandibulaire avec extractions de 38 et 48, génioplastie (les dents de sagesse supérieures seront extraites ultérieurement afin de ne pas accentuer la perte osseuse distale). La période de repos a duré 3 semaines durant lesquelles l’alimentation était mixée puis molle. La reprise de l’alimentation « normale » se fait au bout de 2 mois post-chirurgie. Les finitions orthodontiques ont duré 6 mois (fig. 3).

occlusion-et-profil-en-fin-de-traitement

Figures 3a, 3b : occlusion et profil en fin de traitement.

La jeune fille qui présentait un visage plutôt triste et déjà « vieux » pour son âge est devenue une jeune femme au visage épanoui et volontaire.

2ème cas :

Melle B. est une jeune fille de 14 ans qui vient consulter avec sa maman pour sa malocclusion.

Elle présente une malocclusion de classe II proalvéolie supérieure avec insuffisance de sens transversal supérieur (fig. 4a, 4b), associée à une rétromandibulie sur un type facial normodivergent.

Les orifices narinaires sont étroits, le visage est cerné, la respiration est majoritairement buccale. L’occlusion labiale est forcée, la patiente est globalement mal à l’aise avec son visage (sourire, respiration) (fig. 4c, 4d).

orifices-narinaires-hypodeveloppes

Figures 4a, 4b, 4c, 4d : malocclsuion de classe II,1 + orifices narinaires hypodéveloppés, occlusion labiale forcée.

La préparation orthodontique par multibague bimaxillaire a duré presque 2 ans. La patiente a été opérée à l’âge de 16 ans (Dr Dominique DEFFRENNES) : ostéotomie de bascule du maxillaire avec extractions des 4 dents de sagesse pendant le temps chirurgical et ostéotomie d’avancée mandibulaire (fig. 5). Les finitions orthodontiques ont duré 6 mois.

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Figures 6a, 6b, 6c, 6d : occlusion et visage en fin de traitement.

Le développement du sens transversal maxillaire a permis une amélioration de la respiration nasale : les orifices narinaires se sont spontanément développés. L’occlusion labiale au repos est obtenue sans effort (fig. 6). Melle B. est devenue une jeune fille épanouie, qui n’est plus préoccupée par l’inconfort de son visage ; elle se trouve maintenant jolie et a confiance en elle.

Traitements orthodontico-chirurgicaux chez le jeune adulte (20 – 30 ans)

C’est la tranche d’âge la plus concernée par les traitements orthognathiques. Bien que la chirurgie représente toujours une crainte pour ces patients, ils acceptent majoritairement de se faire opérer car ils sont conscients de leur malocclusion et considèrent qu’ils pourront profiter de la correction de leur décalage squelettique.

Ils consultent souvent plusieurs orthodontistes avant de se décider. Le parodonte est encore de bonne qualité, les organes dentaires ne sont pas encore altérés par les malocclusions.

3ème cas :

Melle Z. est une jeune adulte de 22 ans qui vient consulter car elle trouve ses dents « en avant ». Elle présente en fait une malocclusion de classe II par rétromandibulie. De profil, les rapports labiaux sont inversés, le sillon labio-mentonnier est marqué et la partie inférieure du visage est en retrait (fig. 7).

malocclusion-de-classe-II-retromandibulie

Figures 7a, 7b, 7c, 7d : malocclusion de classe II rétromandibulie.

La préparation orthodontique a été rapide (12 mois) et une simple ostéotomie d’avancée mandibulaire a été réalisée (Dr Bernard NEGRIER).

La patiente qui avait un visage fuyant a maintenant un visage harmonieux (fig. 8a) ; on imagine parfaitement le vieillissement prématuré des sillons naso-géniens, l’apparition de plis dans le prolongement des commissures des lèvres (rides d’amertume) et bien sûr une aggravation de la proalvéolie (par pression labiale inférieure) si celle-ci n’avait pas été corrigée (fig. 8).

fin-de-traitement

Figures 8a, 8b, 8c, 8d : fin de traitement.

4ème cas :

Mr P., 30 ans, consulte pour la malposition de 22. Il s’agit d’une malocclusion de Classe II,2 associée à une partie inférieure du visage effacée (fig. 9).

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Figures 9a, 9b : malocclusion de classe II, 2 ; profil fuyant.

Une ostéotomie simple d’avancée mandibulaire a permis la correction de la rétromandibulie (Dr Dominique DEFFRENNES); il n’y a pas eu besoin de génioplastie.

Une occlusion de classe I équilibrée est obtenue (fig. 10b) la supraclusion est complètement levée (ce qui évitera une usure prématurée du groupe incisivo-canin antérieur et une altération mécanique du parodonte). On peut aussi noter que le gain esthétique est majeur : le profil fuyant s’est masculinisé, ce changement d’aspect global du visage a donné davantage d’assurance au patient (fig. 10a).

Dans ce genre de malocclusion de classe II, 2, il serait très préjudiciable esthétiquement d’envisager les extractions de 14 et 24 en vue d’une classe II thérapeutique : en effet, cela augmenterait la rétrusion du profil et l’angle sous-nasal serait encore plus ouvert. De plus, cette rétrusion mettrait le patient dans une situation à risque de syndromes d’apnée obstructive du sommeil.

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Figure 10a, 10b : avancée mandibulaire + occlusion en fin de traitement.

Exemples de traitements chez l’adulte de 40-50 ans…60 ans

Il n’y a pas de limite d’âge pour pouvoir bénéficier d’un traitement orthodontique associé à une chirurgie des maxillaires. C’est une question d’état psychologique du patient qui se sent loin de la fin de vie et qui a la maturité pour décider de corriger une malocclusion dont il souffre depuis trop longtemps. Ces patients sont en recherche de bien-être.

5ème cas :

Mme B., 41 ans, n’a jamais eu de traitement orthodontique plus jeune. Elle remarque que ces incisives inférieures remontent et touchent le palais ce qui engendre parfois des blessures.

Elle présente une malocclusion de classe II, DDM par rétromandibulie avec proalvéolie supérieure et insuffisance de sens transversal supérieur associés (fig. 11). On remarque que le sillon labio-mentonnier est marqué (fig. 11a).

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Figures 11a, 11b, 11c, 11d : malocclusion de classe II, 1 : proalvéolie supérieure, rétromandibulie, sillon labio-mentonnier marqué

La préparation orthodontique pour corriger le sens transversal et la DDM aura été de 30 mois (fig. 12).

Une ostéotomie d’avancée mandibulaire avec géniectomie a été réalisée (Dr Bernard NEGRIER).

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Figures 14a, 14b, 14c, 14d : malocclusion de classe III, hypodéveloppement du maxillaire, promandibulie.

En plus de la correction de la malocclusion, le visage de la patiente s’est rajeuni : l’augmentation de la dimension verticale liée à l’avancée mandibulaire a toujours un effet de lifting sur la partie basse du visage (sillon nasio-génien, pli d’amertume, sillon-labio-mentonnier) (fig. 13).

6ème cas :

Mme R., 45 ans consulte pour des raisons esthétiques et parce qu’elle souffre de douleurs dans la nuque qu’elle attribue à sa malocclusion.

Elle présente une malocclusion de classe III avec inversé d’articulé antérieur sur un type facial hypodivergent, déviation des milieux, pertes dentaires et reconstructions prothétiques multiples (fig.14).

Une ostéotomie d’avancée et de dérotation maxillaire a été réalisée associée à une ostéotomie de recul mandibulaire (Dr Dominique DEFFRENNES). En plus du rétablissement d’une occlusion équilibrée et fonctionnelle (fig. 15a), cette patiente qui avait presque l’expression d’un édenté a maintenant un visage harmonieux au repos comme dans le sourire (fig. 15c, 15d).

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Figures 15a, 15b, 15c, 15d : occlusion et visage en fin de traitement.

7ème cas :

Mme B., 54 ans, consulte pour les malpositions de 12 et 22. Elle a déjà eu de nombreux soins dentaires (implants, bridges, facettes…) (fig. 16b). Elle présente une malocclusion de classe II, 2 rétromandibulie avec supraclusion (fig. 16b). Le profil est fuyant et la lèvre supérieure est quasi inexistante (fig. 16a).

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Figure 16a, 16b : profil fuyant, malocclusion de classe II, 2.

Une ostéotomie d’avancée mandibulaire associée à une génioplastie (fig. 18) été réalisée (Dr Bernard NEGRIER) puis une reconstruction prothétique globale a été entreprise (fig. 17b).

reconstruction-prothetique

Figures 17a, 17b : fin de traitement : équilibre nez-menton +reconstruction prothétique.

L’avancée des incisives supérieures a permis de retrouver le vermillon de la lèvre correspondante (fig. 19) ; l’avancée mandibulaire associée à la génioplastie a rééquilibré le nez avec le menton (fig. 17a). Aussi, la correction de la supraclusion incisive permet d’envisager d’éventuelles reconstructions prothétiques dans de meilleures conditions occlusales.

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Figure 18 : avancée mandibulaire + génioplastie. Figure 19 : vermillon de la lèvre supérieure.

Conclusion

L’intérêt occlusal des traitements orthodontiques doit toujours être corrélé à l’intérêt esthétique global du visage. Les traitements orthodontiques associés à une chirurgie du ou des maxillaires n’allongent pas particulièrement la durée des traitements ; ils peuvent même être parfois plus courts et garantissent la correction de la malocclusion si l’indication est bien posée et si la préparation orthodontique a été menée dans les règles.

L’impact esthétique des extractions dentaires, comme alternative aux traitements orthodontico-chirurgicaux, doit bien être évalué.

Plus on laisse vieillir une dentition en malocclusion plus elle est exposée à un vieillissement dentaire et parodontal prématuré ; les éventuelles reconstructions dentaires sont plus fragiles car soumises à des forces occlusales non équilibrées. Il est donc logique d’encourager les jeunes adultes dans ces protocoles afin de préserver au mieux les organes dentaires.

Les patients qui ont suivi des protocoles orthodontico-chirurgicaux bien menés, même si la période de la chirurgie est toujours une source d’inquiétude, sont finalement très satisfaits du résultat obtenu et ne regrettent pas leur décision. L’harmonie fonctionnelle et esthétique ne pourra avoir que des conséquences positives sur leur développement personnel et professionnel.

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A propos de l'auteur

Hoa-Cuc TRAN-MINH

Spécialiste Qualifiée en Orthodontie, CECSMO, Paris 7
Ancien interne des hôpitaux de Paris,
Maîtrise en Sciences Médicales

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