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Préparation parodontale pré-prothétique sur parodonte sain – Considérations biologiques et esthétiques

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L’intégration esthétique de prothèses dans le secteur antérieur est assurée par une cohabitation harmonieuse entre les éléments prothétiques et le parodonte. Pour assurer un résultat optimum, le parodonte devrait présenter d’une part un état de santé stable dans le temps (absence d’inflammation), et d’autre part des qualités visuelles immédiates et pérennes.

Le premier point est assuré par une application des principes de respect de l’unité dento-gingivale et par un contrôle de plaque personnel et professionnel adapté. Le second point fait intervenir des éléments de décision plus complexes.

Unité dento-gingivale

Le respect de l’espace biologique suppose que les manœuvres prothétiques et la position de la limite cervicale restent à distance du système d’attache (Fig. 1).

La position idéale de cette limite cervicale, pour la santé parodontale, est supra-gingivale (Valderhaug 1976). Elle est rarement possible dans le secteur antérieur.

Une limite intra-sulculaire, ne s’étendant pas au-delà d’1 mm dans le sulcus est souvent bien tolérée, mais reste un compromis. Cette limite doit impérative-ment suivre l’anatomie gingivale, en particulier dans les zones proximales.

La restauration de l’espace biologique peut nécessiter une élongation coronaire chirurgicale avec un risque de perturbation de l’alignement des collets. Ce risque est un élément de décision important, qui peut constituer une contre-indication dans des situations à forte demande esthétique. L’extrusion orthodontique s’avère alors être une alternative de choix lorsqu’elle est possible.

Il faut noter qu’après une chirurgie parodontale d’apicalisation (élongation coronaire), la position de la gencive marginale se modifie au delà de 6 semaines.

12 % des sites subissent une récession de 2 à 4 mm dans cette période (Bragger 1992). Une période de temporisation longue (3 mois) est donc très souvent préférable.

Enfin, le choix des formes de contour prothétiques (embrasures cervicales en particulier) intègre également ce dilemme esthétique/prévention. Il doit permettre l’accès au contrôle de plaque, tout en assurant le remplissage papillaire et la stimulation gingivale.

Unité-dento-gingivale

Les éléments du succés

Un succès esthétique en prothèse, peut être défini comme un rapport harmonieux entre les différents composants du sourire (les lèvres, les dents et la ligne des collets).

Il serait cependant réducteur de ne prendre en compte que les composants visibles dans le sourire « naturel ». Il existe en effet un paramètre subjectif en la matière, et il serait plus juste de considérer que la satisfaction du patient (informé) est le principal objectif de ces traitements.

L’information préalable du patient s’avère donc primordiale en ce qui concerne :

  • Les différentes options thérapeutiques,
  • La prévisibilité des interventions,
  • Les éléments pouvant influencer négativement le résultat (facteurs de risque).

Une approche basée sur la demande du patient (si elle reste réaliste) peut permettre d’une part d’éviter des surtraitements chez des patients peu demandeurs, et d’autre part de repérer précocement des patients pour lesquels le degré d’exigence est incompatible avec la prévisibilité du traitement.

Un entretien médical orienté est donc indispensable avant tout examen clinique. Un diagnostic et une préparation parodontales pourront ensuite être entrepris préalablement à la réalisation de prothèses dans le secteur antérieur.

Les-éléments-du-succés

Le diagnostic parodontal

Position de la lèvre supérieure

L’observation d’un sourire « naturel » permet, dès la première consultation, de repérer les situations à risque pour lesquelles la position de la lèvre supérieure expose largement la ligne des collets (sourire gingival) et qui nécessitent une attention particulière (Cas clinique 2).

Selon Tjan (1984), 11 % des patients exposent largement le collet gingival, tandis que 20 % n’exposent pas du tout la gencive. Les 69 % restants exposent uniquement les papilles inter-dentaires.

Avec le vieillissement, la ligne du sourire se modifie et découvre de moins en moins les incisives maxillaires (Al Wazzan 2004).

Le-diagnostic-parodontal

Evaluation de la ligne des collets

La ligne des collets suit le rebord alvéolaire sousjacent.

Une ligne des collets harmonieuse est conditionnée par (Fig. 2) :

  • Les proportions dentaires (rapport hauteur largeur),
  • La symétrie par rapport à la ligne médiane,
  • La présence de papilles inter-dentaires.

En présence d’une dysharmonie, un alignement chirurgical (ou orthodontique) des collets visera à rétablir le maximum de symétrie et des proportions dentaires agréables.

Epaisseur de la gencive

Il est admis que la présence de gencive kératinisée n’est pas nécessaire pour maintenir la santé parodontale, dans un cadre d’hygiène contrôlée, en denture naturelle (Wennström 1983).

L’observation des biotypes parodontaux montre, par ailleurs, que les patients présentant un biotype « fin » (dents longues et étroites, parodonte fin et festonné) ont plus de récessions parodontales, que les patients à biotype « épais » (Olsson & Lindhe 1991).

Enfin, il est prouvé qu’en présence de restaurations dentaires à limite intra-sulculaire, la finesse de la gencive marginale augmente le risque de récession (Ericsson & Lindhe 1984). Cette récession est la conséquence combinée du traumatisme opératoire et de l’accumulation de plaque au niveau du joint. Cette double agression crée une lésion inflammatoire qui, sur une gencive fine, occupe et dégrade tout le tissu conjonctif entraînant un effondrement de la gencive libre et donc une récession, en général vestibulaire (Fig. 3).

Greffe-de-conjonctif-enfoui-avant-couronne

La stabilité des tissus marginaux dans le temps, est un défi majeur en prothèse esthétique. Une évaluation de la typologie parodontale permet de repérer les situations à risque (biotype fin). Une attitude préventive est nécessaire chez ces patients.

Donc, lorsque l’on envisage une restauration dentaire intéressant une face vestibulaire, et que la limite de cette restauration doit être maintenue dissimulée dans le sulcus, on s’assurera au préalable de la qualité de la gencive marginale (en particulier de son épaisseur), afin d’assurer des possibilités de contrôle de plaque optimales et de prévenir une récession faisant apparaître plus ou moins rapidement cette limite.

Aménagements parodontaux pré-prothétiques

Après ces différentes évaluations, il est possible d’une part de fixer les positions des bords incisifs, idéalement par rapport à la lèvre, et d’autre part de déterminer la position de référence des collets, respectant les proportions dentaires idéales. Ces deux points seront, si possible, intégrés sur les prothèses provisoires.

L’obtention de la position de référence souhaitée peut alors nécessiter un déplacement des collets dans le sens apical (allongement coronaire) ou coronaire (recouvrement) ; les deux situations peuvent cohabiter au sein d’un même sourire.

Alignement des collets par apicalisation

En présence d’un excès gingival une gingivectomie peut être réalisée, en maintenant une hauteur gingivale suffisante (Cas clinique 1). Un lambeau déplacé apicalement est indiqué dans les autres situations, pour préserver le capital de gencive.

Quelque soit la solution envisagée, la stabilité dans le temps de la nouvelle position obtenue, suppose une modification du compartiment osseux (ostéoplastie) adaptée à la nouvelle position du rebord gingival : le rebord osseux sera positionné 3 mm apicalement au rebord gingival (Cas clinique 2).

Alignement des collets par déplacement coronaire

Le lambeau déplacé coronairement est la solution de choix pour diminuer la hauteur de la couronne clinique. Le choix des incisions prendra en compte en priorité le risque esthétique après cicatrisation. Les incisions de décharge verticales seront proscrites ou déplacées dans des zones peu visibles.

La finesse de la gencive, fréquente dans ces situations, indique souvent l’association d’un apport de tissu conjonctif (Cas clinique 3).

Papilles inter-dentaires

Au niveau proximal, la présence d’une papille interdentaire remplissant l’espace dépend de la distance séparant le point de contact proximal et le sommet du septum osseux (Tarnow 1992). Lorsque cette distance est de 5 mm, le remplissage papillaire est potentiellement complet. Au delà de 6 mm le remplissage papillaire peut être partiel (Fig 4). La modification des profils prothétiques (apicalisation des points de contact proximaux) peut donc permettre un remplissage papillaire.

La reconstruction papillaire chirurgicale est peu documentée (rapports de cas). Les approches proposées n’ont pas prouvé leur prévisibilité ni fourni de données sur la stabilité à long terme (Pini Prato 2004).

L’attitude clinique sera donc préventive en chirurgie (préservation des septa osseux) et optimisera l’utilisation des prothèses provisoires dans les semaines suivantes.

Greffe-de-conjonctif-enfoui

Renforcement de la gencive marginale

Longtemps utilisée, la greffe épithélio-conjonctive a été peu à peu abandonnée dans les indications cliniques à demande esthétique, au profit des greffes de tissus conjonctif qui s’intègrent mieux esthétiquement.

Il ne faut cependant pas négliger les risques esthétiques de ces techniques et en particulier, la prolifération gingivale parfois observée et l’exposition du tissu conjonctif en cours de cicatrisation pouvant entrainer un pli gingival (Cas clinique 4).

On privilégiera donc un apport de tissu d’épaisseur modérée et un enfouissement complet de la greffe.

L’apport de tissu conjonctif enfoui au collet des piliers prothétiques assure un épaississement tissulaire en regard du joint prothétique garantissant une stabilité du collet dans le temps.

Aménagement des zones édentées

Au niveau des pontiques de bridge, la présence d’un défaut horizontal (Classe 1 de Siebert) peut être traitée par greffe conjonctive, de façon prévisible, y compris pour des défaut importants (Cas clinique 5).

L’association d’une composante verticale au défaut (classe 2 et 3 de Seibert) rend l’intervention plus aléatoire. Selon l’exigence des patients, plusieurs interventions peuvent s’avérer nécessaires, avec un résultat imprévisible.

Aménagement-de-crête-effondrée

Conclusion

L’intégration réussie de prothèses dans le secteur antérieur, comme ailleurs, passe par une attitude préventive de respect de l’espace biologique. Cependant le résultat esthétique est toujours la priorité, et des compromis avec la biologie sont parfois nécessaires.

La stabilité des tissus dans le temps sera fortement dépendante de la qualité gingivale. C’est pourquoi un examen préalable et précis du parodonte est systématique.

Des aménagements parodontaux seront souvent nécessaires (en particulier avec un biotype fin), et une temporisation de qualité sera une des clefs du succès. La prévisibilité des ces traitements, parfois difficile à évaluer, doit être à la hauteur du degré d’exigence des patients.

Bibliographie

1. Al Wazzan KA.The visible portion of anterior teeth at rest. J Contemp Dent Pract. 2004 Feb 15;5(1):53-62
2. Brägger U, Lauchenauer D, Lang NP. Surgical lengthening of the clinical crown. J Clin Periodontol. 1992 Jan;19(1):58-63
3. Ericsson I, Lindhe J. Recession in sites with inadequate width of the keratinized gingiva. An experimental study in the dog. J Clin Periodontol. 1984 Feb;11(2):95-103
4. Olsson M, Lindhe J. Periodontal characteristics in individuals with varying form of the upper central incisors. J Clin Periodontol. 1991 Jan;18(1):78-82
5. Prato GP, Rotundo R, Cortellini P, Tinti C, Azzi R. Interdental papilla management: a review and classification of the therapeutic approaches. Int J Periodontics Restorative Dent. 2004 Jun;24(3):246-55
6. Seibert JS. Ridge augmentation to enhance esthetics in fixed prosthetic treatment. Compendium. 1991 Aug;12(8):548, 550, 552 passim.
7. Tarnow DP, Magner AW, Fletcher P. The effect of the distance from the contact point to the crest of bone on the presence or absence of the interproximal dental papilla. J Periodontol. 1992 Dec;63(12):995-6
8. Tjan AH, Miller GD, The JG. Some esthetic factors in a smile. J Prosthet Dent. 1984 Jan;51(1):24-8
9. Valderhaug J, Birkeland JM. Periodontal conditions in patients 5 years following insertion of fixed prostheses. Pocket depth and loss of attachment. J Oral Rehabil. 1976 Jul;3(3):237-43
10. Wennström J, Lindhe J. Role of attached gingiva for maintenance of periodontal health. Healing following excisional and grafting procedures in dogs. J Clin Periodontol. 1983 Mar;10(2):206-21

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A propos de l'auteur

Dr. Jacques MALET

Diplôme Universitaire de Parodontologie et d’implantologie, Paris VII
Ex Assistant Université Paris VII Denis Diderot
Pratique limitée à la parodontologie et la chirurgie implantaire

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