En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés à vos centres d'intérêts.

LEFILDENTAIRE est un site réservé aux professionnels de la santé dentaire.
Si vous n'êtes​ pas un professionnel de santé, vous pouvez obtenir des réponses à vos questions par des experts sur Dentagora.fr en activant le bouton Grand Public.

Je suis un professionnel Grand Public

Incidence de la prothèse fixée sur les tissus parodontaux : de la préparation à la maintenance

0

Toute intervention de prothèse fixée doit être considérée comme une phase de la thérapeutique trouvant sa place dans une démarche globale respectueuse des exigences individuelles du patient. La réalisation prothétique est basée sur un examen clinique rigoureux prenant en compte les éléments biologiques, en particulier parodontaux.

Localisation-des-limites

De la préparation à la maintenance, prothèse fixée et santé parodontale doivent être associées. Les impératifs parodontaux doivent précéder la réalisation prothétique et établir des conditions permettant de faciliter la réalisation de nos actes et être garants de leur pérennité en assurant une maintenance efficace.

Les préparations

Les préparations en prothèse fixée doivent répondre à de grands principes [10] :

  • préparer des formes de limites de finition assurant la pérennité de nos restaurations
  • obéir au principe d’économie tissulaire défini par LEIBOWITCH
  • permettre un travail de qualité au laboratoire
  • réaliser des limites de finition précises, « courbes, continues et parfaitement lisibles au laboratoire » d’après GIROT [8], respectueuses du parodonte.

La connaissance de l’espace biologique (Fig. 1) défini par GARGIULO [6] 1961 est un prérequis.

Les différentes formes de limites cervicales

Deux grands types de limites cervicales semblent s’imposer désormais au vu de l’évolution des techniques et des matériaux : le congé et l’épaulement à angle interne arrondi. Ces différentes formes de limites cervicales ont été proposées, chacune avec des avantages et des inconvénients. Elles semblent aujourd’hui répondre à l’ensemble des situations cliniques [8, 9] (Fig. 2).

Les-différentes-formes-de-limites-cervicales

Fig. 1 : l’espace biologique défini par GARGIULO 1961 [6] Fig. 2 : les différentes limites de préparation, le respect du parodonte marginal par la mise en place d’un cordonnet de déflexion [4], préparations supra-gingivale et intra-sulculaire

Localisation des limites

La meilleure localisation des limites prothétiques est supra-gingivale afin de respecter le parodonte. Les limites sont préparées à un niveau juxta-gingival ou intra-sulculaire lorsque des impératifs de rétention (préparations courtes) ou esthétiques interviennent.

Les limites sous-gingivales sont proscrites provoquant la « violation » de l’espace biologique. Elles sont directement responsables de réactions inflammatoires, de la migration apicale de la gencive marginale.

La réalisation de limites de finition au niveau intra-sulculaire ne peut se faire que dans un sulcus sain. D’après WAERHAUG [11], les bords prothétiques ne doivent pas s’approcher de plus de 0,4 mm de l’attache épithéliale. Si l’on se réfère aux travaux de MAYNARD et WILSON la profondeur du sulcus sur les dents antérieures varie entre 0,5 et 1 mm, exceptionnellement 1,5 mm. Au vu de ces éléments, la réalisation de limites de finition intra-sulculaires ne devra se faire plus profondément que 0,5 à 0,7 mm dans le sulcus afin qu’il soit accessible aux manœuvres d’hygiène [10] sans abîmer l’attache épithélio-conjonctive.

Lors des préparations, afin de ne pas léser l’attache épithélio-conjonctive par des manœuvres instrumentales iatrogènes, il est recommandé de placer un cordonnet de déflexion gingival à l’entrée du sillon [4] (Fig. 2).

Les prothèses transitoires

Les prothèses transitoires jouent un rôle esthétique et fonctionnel au niveau dentaire, occlusal et bien évidement parodontal. « Il n’y a pas de réalisation prothétique fixée sans réalisation d’une prothèse transitoire, que sa durée en bouche soit brève ou longue ». La réalisation de prothèses transitoires est une étape capitale de toute restauration prothétique [3, 5, 7].

D’un point de vue parodontal, la prothèse transitoire a plusieurs objectifs [10] :

  • préserver le parodonte marginal
  • faciliter la maturation des tissus parodontaux
  • respecter les embrasures et reconstituer le point de contact
  • contrôler la stabilité du parodonte marginal avant la réalisation de la prothèse d’usage
  • faciliter l’enregistrement de la limite cervicale.

Il existe trois grandes méthodes de réalisation :

  • les techniques directes : isomoulage, bloc technique et coques préformées (moule Odus®, moule Ion®)
  • les techniques semi-directes : isomoulage à partir d’un wax up
  • les techniques indirectes : gouttière thermoformée et techniques des coques.

La mise en place des prothèses transitoires vis-à-vis du parodonte devra répondre à deux grands principes [10] :

  • adaptation précise des bords sur les limites cervicales
  • établir une morphologie axiale qui respecte les embrasures et les possibilités de contrôle de plaque.

Le scellement des prothèses transitoires se fait avec un ciment transitoire devant présenter une résistance aux infiltrations, une adhérence assurant la rétention et permettant son retrait et être biocompatible. L’élimination des excès est capitale pour éviter la présence de débris du matériau de fixation transitoire au niveau des bords prothétiques ou du sulcus. Ce « toilettage sulculaire » se fera à l’aide d’une curette type mini CK6 et la dépose de vase­line, sur les bords prothétiques. L’élimination du ciment transitoire sera ainsi facilitée (Fig. 3).

Les-prothèses-transitoires

Fig. 3 : objectifs des prothèses transitoires d’un point de vue parodontal, respect des embrasures [10], importance du « toilettage sulculaire »

Empreinte

L’empreinte est un vecteur essentiel de l’information avec le laboratoire de prothèse en vue de la réalisation des reconstructions prothétiques. Cet enregistrement doit retranscrire le plus fidèlement possible la situation clinique et notamment la relation entre les limites de finition et le parodonte marginal. Il faudra ainsi choisir la technique d’empreinte la mieux adaptée à la situation clinique en prenant notamment en compte le biotype parodontal.

Les paramètres pris en compte sont [10] :

  • la situation des limites de finition (intra-sulculaires, juxta-gingivales, supra-gingivales)
  • le biotype parodontal
  • le nombre, la forme et la répartition des préparations à enregistrer
  • la dualité tissulaire (mobilité des dents).

Les différentes techniques d’empreinte

Les différentes techniques d’empreinte présentent un caractère plus ou moins compressif (du plus compressif au moins compressif : wash technique > double mélange > monophasé). La prise en compte de cet élément permettra l’accès à des zones difficiles d’enregistrement (injection à la seringue) et à la mise en œuvre des techniques d’accès au sulcus (par éviction sulculaire ou par déflexion gingivale) adaptée à chaque situation clinique : intermédiaire ou favorable [2].

Choix de la technique d’empreinte

La technique d’empreinte est choisie après un exa­men clinique rigoureux et la prise en compte de divers paramètres tels que : la qualité du parodonte marginal et la situation de la limite de finition. La technique ne sera choisie qu’après confrontation de tous ces éléments et prise en compte des caractéristiques propres des matériaux (Fig. 4).

Les-différentes-techniques-d’empreinte

Fig. 4 : techniques d’empreinte et biotype parodontal – le choix raisonné [2]

a – Analyse de la qualité du parodonte

Différents éléments sont analysés : la qualité du parodonte, la hauteur de gencive attachée, sa tonicité et son épaisseur. De l’analyse de ces éléments va découler son aptitude à supporter plus ou moins bien les techniques d’accès au sulcus, la compression des matériaux utilisés et la technique d’empreinte.

Ainsi, pour un parodonte en situation favorable, toutes les méthodes d’empreinte sont exploitables. Pour un parodonte intermédiaire, les méthodes les plus compressives (wash technique) sont à éviter [2, 10].

b – Influence de la position des limites de préparation (Fig. 4)

Lors de la réalisation de limite supra-gingivale, il n’y a pas d’incidence sur le choix de la technique d’empreinte.

Lors de la réalisation de limites juxta-gingivales ou intra-sulculaires, nous serons amenés en fonction de la profondeur du sulcus, de la tonicité de la gencive marginale, et de la plus ou moins grande présence de fluide gingival, à utiliser une technique d’accès au sulcus et une technique d’empreinte adaptées à la situation clinique [2].

Essayage de l’armature et du biscuit

L’essayage des restaurations prothétiques avant la finition permet de vérifier la fidélité des enregistrements des rapports maxillo-mandibulaires, de contrôler l’adaptation des armatures, d’évaluer la couleur (luminosité, teinte, saturation) mais surtout de vérifier leur intégration parodontale.
Les essayages portent sur l’armature ou le biscuit (Fig. 5).

Au stade des armatures, il convient de contrôler la précision, la morphologie des embrasures, l’assise et l’ajustage des coiffes prothétiques visuellement, avec une sonde et à l’aide de Fitt Checker®. Une parfaite continuité doit être obtenue entre la dent et l’armature.

Au stade des biscuits, il convient de vérifier à nouveau la précision et l’assise de la restauration, les contacts interproximaux et l’espace laissé aux papilles interdentaires.

Les essayages des armatures et des biscuits sont des étapes essentielles dans le maintien de la santé parodontale. Ils permettent de valider et d’améliorer les paramètres matérialisés avec les prothèses transitoires [10].

Essayage-de-l’armature-et-du-biscuit

Fig. 5 : importance de l’essayage des armatures et des biscuits au travers d’un cas clinique : réalisation de 4 coiffes céramo-métalliques antérieures

Mise en place du matériau de fixation

La mise en place du matériau de fixation et son interposition est une étape délicate devant confir­mer les critères précédemment validés vis-à-vis des limites de préparation et du parodonte margi­nal [1, 12].

Scellement conventionnel, scellement adhésif, scellement auto-adhésif

Les objectifs sont d’obtenir le joint de scellement le plus fin possible et l’absence de débris au sein du sulcus, ou pire au-delà (Fig. 6).

Collage

Les procédures de mise en oeuvre du collage : la pré­paration supra-gingivale et l’utilisation d’un champ opératoire (digue) excluent les risques parodontaux inhérents à la mise en place de ce matériau de fixa­tion (Fig. 6).

Maintenance

La maintenance est une étape essentielle et fonda­mentale, faisant partie intégrante de la thérapeutique [10]. Elle doit être suivie par le patient, détaillée, explicitée et inscrite au sein du devis prothétique.

Les contrôles de maintenance seront fonction de divers paramètres :

  • importance et étendue de la restauration prothétique
  • contrôle de plaque, motivation à l’hygiène
  • présence et contrôle des parafonctions : bruxisme, tics, manies

Ces contrôles reposeront sur un examen clinique rigoureux, un sondage, un examen radiographique et des contrôles occlusaux (Fig. 7).

Mise-en-place-du-matériau-de-fixation

Fig. 6 : mise en place du matériau de fixation et procédures de mise en oeuvre lors d’un scellement ou d’un collage [10] Fig. 7 : illustration de l’importance de la maintenance dans le cadre d’une réhabilitation globale avant thérapeutique ODF, rôle du passage du fil dentaire et des brossettes dans le contrôle de plaque

Conclusion

Les étapes de réalisations prothétiques ne seront entreprises qu’après assainissement parodontal, à l’exception de la dépose d’éléments iatrogènes suivie de la mise en place de prothèses transitoires. L’ensemble des étapes prothétiques doit s’adapter à la situation parodontale de chaque cas. Prothèse et santé parodontale sont indissociables. Une bonne connaissance des critères de choix et des incidences de l’ensemble de nos étapes de prothèse fixée sur le parodonte sera le garant de la pérennité de nos restaurations…

Bibliographie

1 – BARTALA M, Scellement – Collage ? Le choix raisonné. Cah Prot Mars 2002. 117 :67-82.
2 – BLANCHARD JP, GEOFFRION J, MARIESCU S, SURLEVE-BAZEILLE JE. Choix des techniques d’éviction gingivale. Real Clin 1993 ; vol 4(4): 447-458.
3 – DERRIEN G. Les restaurations provisoires en prothèse conjointe. Cah Prot 1991;73:67-74.
4 – DRAGOO MR., WILLIAMS GB. Réactions des tissus parodontaux aux interventions prothétiques. Rev Int Paro Dent Res. 1981 ; 1: 9-23.
5 – FERRARI JL. Les prothèses intermédiaires. Real Clin 1994 ;5 :7-14.
6 – GARGIULO AW, WENTZ FM, ORBAN BJ. Dimensions and relations of the dento-gingival junction in humans. J Periodon-tol. 1961 ; 32:261-267.
7 – GEOFFRION J., GAUTIER C., BLANCHARD JP. Stabilité gingivale et prise d’empreinte: incidence des prothèses provisoires. Rel Clin 1993 ; vol 4(4): 435-444.
8 – GIROT G. Méthodologie des préparations. Real Clin 1996 ; 74 :409-30.
9 – MAGNE P, BELSER U. Les préparations coronaires périphériques. Réal. Clin. 1996 ; vol 7 (4) :447-457.
10 – UNGER F, LEMAITRE PH, HOORNAERT A. Prothèse fixée et parodonte. Editions Cdp, Paris , 1997.
11 – WAHERAUG J. Histologic considerations wich govern where the margin restorations should be located in relation to the gingiva. Dent Clin North Am 1960;3:161.
12 – WOUTERS V, COTO-HUNZICKER V, PERRIARD J. Scellement : survol théorique et clinique des ciments de scellement. Cah Prot 1996;96 :77-82.

Partager

A propos de l'auteur

Dr. Arnaud SOENEN

Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire sous-section 58-02 : Prothèse(s), Université de BORDEAUX

Laisser une réponse