La pose d’un diagnostic étiologique est le préalable à tout traitement parodontal. Le diagnostic ne peut pas se résumer au simple « état des lieux » (e.i. la mesure de la profondeur de sondage, de la « résorption osseuse », de l’indice de plaque ou des mobilités). C’est l’interprétation des éléments de l’entretien, des signes cliniques et paracliniques (dits “complémentaires”) qui permettra de comprendre quelles sont les raisons qui expliquent les pertes d’attache et les symptômes qui leur sont associés. Il sera alors possible d’entreprendre un traitement étiologique agissant sur les causes et non les conséquences (comme le fait la contention par exemple).
Cahier des charges du diagnostic en parodontie
Un diagnostic en parodontie doit permettre de répondre aux six questions suivantes :
- Quel est le type de maladie ?
- Quelle est la nature de la flore buccale ?
- Quel est l’état d’activité ?
- Quel est le stade d’avancement ?
- Quelle est l’intensité du risque de récidive ?
- Quelles sont les conditions qui vont compliquer le traitement ?
Quel est le type de maladie ?
On distingue deux grandes classes de maladies parodontales :
– Les gingivites pour lesquelles on ne détecte pas de pertes d’attache au niveau clinique et radiologique.
Elles peuvent se subdiviser en 4 catégories :
I. Les gingivites à faible risque de se transformer en parodontite
II. Les gingivites à haut risque de se transformer en parodontite
III. Les gingivites modifiées par des facteurs médicaux
IV. Les gingivites ulcéro-nécrotiques
– Les parodontites qui s’accompagnent de pertes d’attache cliniquement et radiologiquement décelables, avec ou sans formation de poches parodontales. Elles se subdivisent en deux grandes catégories :
I. Les parodontites chroniques de l’adulte (localisées ou généralisées)
II. Les parodontites agressives (localisées ou généralisées)
Quelle est la nature de la flore buccale ?
Pour un sujet donné, il existe deux flores buccales :
– L’une compatible avec la santé parodontale
– L’autre incompatible avec la santé parodontale
Quel est l’état d’activité ?
Les lésions parodontales évoluent par cycles d’activité (en général de courte durée) suivis de périodes de repos ou de rémission, souvent spontanées.
Il existe trois critères d’activité :
– Les critères microbiologiques
Il existe une flore associée à l’activité et une flore associée au repos. La flore compatible avec la santé parodontale est évocatrice de repos. La flore incompatible avec la santé parodontale est souvent associée à l’activité.
– Les critères cliniques
Cinq des huit symptômes associés aux lésions parodontales sont évocateurs d’activité :
I. Le saignement (au brossage, à la mastication, au sondage ou spontanés)
II. Les mobilités
III. Les migrations
IV. L’halitose
V. Les suppurations
– Les critères biologiques
Certains paramètres biologiques (plasmatiques) peuvent être modifiés au cours des épisodes actifs :
I. Augmentation de la vitesse de sédimentation (souvent modeste)
II. Leucocytose (augmentation du nombre de globules blancs)
III. Hyperlipidémie (augmentation des LDL, diminution des HDL)
IV. Augmentation de la CRP (Protéine C réactive) (souvent relativement modeste)
V. Augmentation du fibrinogène plasmatique
Quel est le stade d’avancement ?
Les parodontites se caractérisent par des pertes d’attache. Elles peuvent être localisées ou généralisées. Leur sévérité s’apprécie par un examen clinique (appréciation des récessions gingivales par exemple) et un bilan radiologique long-cône (localisation ou généralisation, sévérité des pertes d’attache interproximales et interradiculaires).
Quelle est l’intensité du risque de récidive ?
Les caractéristiques du risque de récidive d’une parodontite sont sensiblement les mêmes que celles de son risque d’apparition.
Les plus importantes sont les suivantes :
a. Facteurs génétiques : antécédents familiaux et/ou PST +
b. Susceptibilité aux infections associée à une immunodépression
c. Présence de stress chronique avec anxiété (dépression)
d. Résistance à la carie dentaire
Quelles sont les conditions qui vont compliquer le traitement ?
Il existe des conditions qui ne sont pas strictement d’ordre parodontal. Cependant, elles peuvent compliquer le bon déroulement du traitement. Les principales situations sont les suivantes :
a. Présence de prothèses adjointes ou conjointes
b. Présence de lésions endodontiques
c. Présence de trauma occlusal (parafonctions, notamment)
d. Facteurs économiques (chômage, dépôt de bilan, contrôle fiscal)
e. Facteurs psychologiques (névroses, psychoses)
Conclusions
On s’aperçoit que la pose d’un diagnostic en parodontie revêt plusieurs aspects : médicaux et buccaux. Le praticien soucieux de prévoir le résultat d’une thérapeutique devra prendre en compte ces deux aspects.
Références bibliographiques
1. Critical Issues in Periodontal Diagnosis – Periodontol 2000 39 : 9 – 177, 2005
2. Charon J. et Mouton C. – Parodontie Médicale, Diagnostic Pages – – CDP Éditions, Paris 2003
3. Global Epidemiology of Periodontal Diseases – Periodontol 2000 29 : 2002 7 – 246, 2005
4. Periodontal Risk Factors and Indicators Periodontol 2000 32 : 9 – 135, 2003
5. Diagnostic Techniques in Periodontology – Periodontol 2000 7 : 7 – 108, 1995
Drs Jacques Charon*, Frédéric Joachim*, Sébastien Dujardin** et Joël Beaulieu***.
* : Parodontiste, Lille, France
** : Post Graduate in Periodontics, Temple University, Philadelphia, USA
*** : Chirurgien-dentiste, Laval, Québec
Photos avec l’aimable autorisation des éditions CDP. «Parodontie médicale» de Jacques Charon et Christian Mouton, Ed. CdP 2003, 464 p, 805 fig, 196 euros. En vente sur www.editionscdp.fr.